Les guerriers de l’ère industrielle : plongée dans l’âme des survivalistes
Le survivalisme a débarqué en France, et ce n’est pas près de partir.
Et je m’y intéresse beaucoup. Parce que j’ai étudié le sujet pendant mes études, parce que ben changement climatique hein, et parce que c’est fun.
Alors comme c’est mon truc, j’ai eu envie de réfléchir à ce qui faisait qu’une personne, une famille ou un groupe avait envie de devenir survivaliste.
Ce qui définissait ces personnes, ce qui les motivait.
Leur(s) imaginaire(s), leur(s) vision(s) du monde, et ce que leur préparation aux changements à venir leur apportait.
Tout simplement parce que nos actes découlent de nos croyances, de notre vision du monde… et de nos motivations profondes.
J’ai repris mes propres recherches universitaires. J’ai également lu quelques publications de psychologues et sociologues, dont le résumé de la thèse de Bertrand VIDAL, mais aussi parcouru les commentaires sur des forums dédiés.
L’Europe et l’Amérique
Une première différence majeure est importante : même s’ils.elles ont des points communs, les motivations des survivalistes américains, leur vision de la survie, est assez différente de celles des Européens.
Le mouvement américain est très anxieux, avec un focus sur la sécurité, la religion, des aspects politiques là où, en France, c’est orienté sur le respect de l’environnement, avec des questions liées à l’autonomie, la vie avec moins d’eau, d’accès à l’énergie, etc.
Clément Champault, responsable communication du Salon du Survivalisme à Paris
Pourquoi ? Notamment parce que nous sommes plutôt des “fourmis”, soulignent les sociologues. Notre culture est plus tournée vers l’épargne que les Nord-Américains, et nous avons une plus grande aversion au danger.
Même si certain.e.s survivalistes français ou européens prônent une approche assez militaire de la “préparation à la survie”, les discours orientés sur cette vision du survivalisme ne plaisent pas (voire pas du tout) à la majorité des Européens. Ils se voient comme des “résilients“, adeptes de l’autonomie et de l’adaptation volontaire, et préfèrent être appelés des preppers que des survivalistes.
La nature vaut mieux que la ville
Retour à une vie sauvage?
Pour certain.e.s survivalistes, le “mal” vient avant tout de notre vie urbaine, de notre détachement de “la terre”, de sa connaissance, de ses ressources, de son respect.
C’est notre habitude de vivre en ville, notre mode de vie citadin qui constitue à la fois un danger (nous ne savons plus produire notre nourriture, nous achetons au lieu de fabriquer…) et un éloignement de notre “nature” profonde.
Nous ne savons plus être autonomes, nous avons perdu les habitudes et les connaissances de nos aïeux, qui eux savaient pêcher, chasser, cultiver un potager.
Il ya donc d’abord la notion de “savoir produire”, à l’opposition du dieu Consommation. L’idée que nous sommes trop dépendants d’un système d’approvisionnement (en eau, nourriture, électricité…) qui peut s’effondrer à tout moment.
Mais il y a aussi le dégoût de la ville, et de la vie citadine.
Celle qui nous enferme dans des appartements où nous sommes isolés, sans connaître nos voisins.
Celle qui nous fait aller d’une boîte à l’autre, enfermés du matin au soir, sans vraiment “être au soleil”.
Celle qui nous oblige à subir les bruits, la pollution, celle qui nous détourne d’une vie saine. Qu’elle soit physique (manger des produits sains et non pas industriels), mais aussi mentale.
Pour les survivalistes qui se définissent comme écologistes, c’est d’ailleurs surtout l’envie d’un “retour aux sources”, “un retour à la terre”. C’est une perte de sens, ou d’envie de vivre d’une certaine manière.
On est alors là plus proche d’une philosophie de vie, d’une vision de ce que doit être une vie heureuse, plus simple, et plus authentique, comme l’est la nature elle-même. A la fois par envie de la protéger, mais aussi de profiter des bienfaits de cette vie à la campagne.
Avec parfois une vision idéalisée de cette nature…
Les survivalistes qui choisissent de vivre à la campagne se rapprochent en ce sens des écologistes, qui veulent un autre rapport à la nature. Ils y voient un lieu de résilience, de possibilité d’autonomie.
On peut plus facilement acheter son lopin de terre, car les prix sont souvent plus bas qu’en ville. Mais c’est aussi parce que c’est vu comme un moyen de s’éloigner des dangers (réels ou imaginaires) des grandes villes. Insécurité, concentration de population, difficultés pour s’enfuir en cas de souci, ou dépendance face aux ravitaillements “de masse”.
Pour ces types de survivalistes, c’est cette vie plus simple et plus en mode “durable” qui peut leur permettre de survivre à des évènements, ceux du quotidien, ou ceux plus importants. Ils.elles se détachent alors de ceux et celles qui prônent une vie sobre pour “aider l’environnement”, rendre le monde meilleur. Car pour eux.elles, le monde ne va pas aller vers le mieux…
Les survivalistes ne croient plus au “progrès”
Le progrès apporté par les deux révolutions industrielles devaient nous sortir de l’aliénation et de la misère pour nous permettre d’atteindre le bonheur individuel, la liberté et la jouissance.
Cette idée de l’avenir, cette idéologie de la croissance a pour beaucoup montré ses limites. Le progrès et l’accumulation de biens matériels n’apporte pas l’épanouissement voulu. Et les États ne protègent pas, ou pas bien, ou pas suffisamment, leurs citoyens. L’esprit d’entraide et le sens du commun s’amenuisent.
Les imaginaires changent : non, le futur n’est pas forcément toujours mieux que le présent.
On regrette même le passé, parfois plus doux, plus sécurisant.
On ne croit plus en une constante évolution, qu’elle soit personnelle ou sociale.
On partage alors l’envie de se recentrer sur des valeurs anciennes, des savoirs ancestraux. On ne se tourne plus vers le futur, mais vers le passé comme source d’imagination, d’identification.
L’envie de changement (par le vide)
Certains survivalistes, rejoints par une partie des preppers, souhaitent que le monde tel qu’il est aujourd’hui s’effondre, disparaisse. Qu’on fasse table rase (“tabula rasa”) du présent, et de ses problèmes. Y compris, et parfois surtout, de ses problèmes personnels.
Que ce soit le capitalisme et la consommation de masse, à l’origine du changement climatique, de l’extinction des espèces, de la pollution, des inégalités de richesse et de qualité de vie entre les pays.
Que ce soit les “grands remplacements” par une immigration vue déjà, ou imaginée dans le futur comme massive par des immigrés d’autres cultures, d’autres religions.
Plusieurs écoles survivalistes coexistent, des plus “humanistes” aux plus “fascisantes”. Il y a surtout un énorme clivage au sein de ceux qui se préparent : d’un côté, des «transitionneurs» à la mode Rob Hopkins, de l’autre une certaine “France Profonde” genre FN et/ou aristocratie et/ou amicale des chasseurs qui tendrait plutôt à prévoir de s’organiser en milices ou en baronnies. Cette France-là représente un bon 25-30 % des gens qui se préparent à un changement.
Arthur Keller, ingénieur membre d’Adrastia
Ou encore l’individualisme, le narcissisme, le manque de solidarité entre les êtres et les peuples.
Ou encore le trop-plein de population humaine qui éradique les autres espèces vivantes…
Les envies, les aspirations, les fantasmes peuvent donc être multiples.
Un autre monde
L’idée derrière cette “remise à zéro” du monde s’accompagne de l’envie d’en créer un nouveau, plus juste et plus humain. Ou pas…
Dans ce domaine, les rêves des survivalistes peuvent être totalement opposés.
D’un côté, ceux qui veulent plus d’égalité entre les peuples, plus de richesses et de bonheur pour tous.tes. Et de l’autre, une envie de “tri sélectif”, qui ne laisserait survivre que les meilleur.e.s, les plus gentils, ou bien les cultures, les “races” (ethnies humaines) supérieures.
Et pour d’autres encore, la pure et simple disparition de l’espèce humaine, source de tous les mots de la Terre. Ceux et celles qui partagent cette vision décident souvent de ne pas avoir d’enfants.
La catastrophe à venir est donc paradoxalement à la fois ce que l’on craint, et ce que l’on souhaite…
Le côté “fun” : aventures et découvertes
Apprendre à se débrouiller seul.e, sortir de sa zone de confort, dépasser ses limites physiques ou mentales… mais aussi développer ses connaissances et ses savoirs-faire.
Quand on s’intéresse au survivalisme, on peut vite devenir accro aux vidéos sur la création d’une BAD (base autonome durable), aux articles et podcasts sur la production d’électricité, la survie en forêt tropicale ou l’aquaponie.
Devenir survivaliste, c’est toucher à tout, de la médecine à la géothermie, de la construction écologique au recyclage des métaux, de la construction d’un radeau et la connaissance de la météo.
De plus en plus de “stages de survie” sont proposés partout dans le monde, en France notamment. Que ce soit pour se former, ou pour s’amuser, se confronter à ses limites, selon l’intensité du stage.
Qu’est-ce qui motive les participant.e.s ? Pour certains, c’est comme pratiquer un sport à risques : on frissonne pour le plaisir.
Quand on n’est pas en situation réelle de crise, le survivalisme est avant tout une vision du monde, une philosophie de vie, mais aussi un but à atteindre, comme dans une compétition.
Dans les commentaires de vidéos ou d’articles de survivalistes, on voit que certains jouent à celui ou celle qui possèdera le moins de choses dans son sac de survie. Ou à qui fabriquera tous ses outils, ou qui connaîtra le mieux les plantes comestibles.
Le côté “loisir, activité, sport, compétition” existe pour certains survivalistes.
Survivalistes et guerriers : l’attraction du danger
Dépassement de soi
L’adrénaline du danger, c’est ce qui explique le succès des émissions de Bear Grills ou Mike Horn. Les téléréalités comme “Koh Lanta”, Wild, la course de survie, ou aux USA, la célèbre Man vs Wild.
C’est ce qui fait qu’on adore les blockbusters comme Le Jour d’Après, 2012 ou Independance Day, pour ne parler que des vieux classiques.
Il y aussi un autre aspect, assez surprenant, relevé par des anthropologues américains comme Marie Douglas et Aaron Wildavsky dans Risk and Culture.
Le survivalisme, sa culture, ses différents groupes culturels, ne se trouvent que dans les pays… en paix. On ne trouve pas de survivalistes en Syrie.
Serait-ce parce qu’il n’y a pas de meilleure période pour se préparer à la guerre que celle de la paix ?
De la possibilité financière et matérielle, de temps et de possibilités d’échanges et de formation, que dans un pays riche ?
Ou est-ce pour jouer à “se faire peur”, éprouver les frissons de l’anticipation de la catastrophe (quelle qu’elle soit?)
Comme on cherche ces frissons en allant voir un film apocalyptique, ou en allant se faire enfermer dans une Escape Room ?
Est-ce parce qu’on se rend compte que notre vie quotidienne n’est justement pas de la survie, mais de la vie, dans une certaine opulence? Que survivre est en fait le quotidien de milliards d’êtres humains, du Vénézuéla au Darfour, de la Syrie à la Corée du Nord, des goulags tchétchènes aux camps de rééducation chinois ?
Là où la sécurité est la plus grande, on fantasme le plus sur l’insécurité. Aurait-on le plus peur quand on est éloigné au maximum des dangers ? On pense à Platon, et à son célèbre mythe de la Caverne…
Notre présent est si sûr que notre avenir nous angoisse
Bertrand Vidal, sociologue, spécialiste du survivalisme
La nostalgie du passé
La société occidentale “moderne” n’a pas apporté son lot de bonheur pour tout le monde.
La solitude née de la disparition de projets communs, de la famille soudée, d’esprit communautaire, comme dans les villages, les quartiers d’antan. La surconsommation qui pousse à l’endettement. Le jetable qui nous lâche, nous déçoit et qui en plus pollue.
Attiré.e.s par le monde d’avant.
Cette attraction n’est pas nouvelle, elle se voit à chaque décennie : on retrouve le goût pour les vinyles, les robes des années cinquante, ou les voitures des années quatre-vingts.
Mais de plus en plus, c’est tout le mode de vie contemporain qui déçoit.
Que ce soit les loisirs, de plus en plus virtuels, les soirées, où on ne danse plus que tout seul.e.
La compétition dans le monde du travail, les besoins financiers de plus en plus élevés, pour faire face à des besoins de plus en plus élevés.
Chez certains survivalistes, il y a une envie de renouer avec les charmes de la vie d’antan.
Celle où on vivait en petite communauté, dans un lieu de vie à soi.
Celle où on avait moins d’objets, où on allait chercher son eau au puits du village, son bois dans la forêt. On avait moins, mais on n’avait pas à payer pour ça. On apprécie les bals de villages, les soirées autour d’un feu, avec d’autres, et pas seul devant son écran de télévision.
C’est le plaisir d’avoir des objets plus simples, plus rustiques, plus durables aussi. D’aller vers l’essentiel, et la qualité, le réparable. L’objet unique qui vous accompagne une partie de votre vie, et ne disparaît pas en quelques semaines, car de mauvaise qualité.
Et on l’espère, ce genre de relation avec soi et avec les autres. Plus authentique, plus simple, plus durable.
Une nouvelle identité, une nouvelle attractivité
Certains et certaines y voient aussi l’occasion de se recréer une nouvelle place dans la société.
On peut rêver de passer du statut de loser (qui peine à trouver un job, à s’épanouir dans un monde centré sur l’acquisition d’un statut social, d’une aisance matérielle), à celui de winner dans ce nouveau monde.
Ceux et celles qui “domineront” seraient ceux et celles qui savent chasser, coudre un vêtement, construire une maison. Celui qui possède un cheval, ou une arme, aura plus d’importance que celui qui maîtrise les cours de la Bourse. Qui aura d’ailleurs, dans cette vision du futur en mode reboot, certainement disparu…
Une envie de Rambo
Pour certains hommes, qui ne se sentent pas “mâles Alpha”, c’est ce qu’on pourrait appeler le “fantasme à la Barjavel”. Comme dans Ravage, les hommes se retrouvent avec plusieurs femmes, dans le but de faire pleins d’enfants, pour reconstituer l’espèce humaine.
En développant des compétences de survie, en plus d’une musculature de guerrier, ils seront plus à même de trouver une compagne de vie.
On constate assez souvent ce genre de recommandation dans les communautés de survivalistes. Prendre soin de son corps, de sa santé, en faisant du sport, en développant des capacités de combat et de force physique.
C’est assez logique, quand on doit couper et transporter des bûches pour alimenter son poêle, quand on veut cultiver son champ, et manier les armes pour se protéger des pilleurs.
Apprendre à se débrouiller, c’est à la fois booster son estime de soi, mais aussi l’estime des autres.
Être enfin accepté.e
Pour certain.e.s, rejoindre le mouvement, un groupe, une communauté en ligne ou en réel de survivalistes, c’est enfin trouver sa place.
A la fois en lui permettant de passer à l’action face à son angoisse, ou son désir d’indépendance. Mais aussi en lui donnant une autre dimension personnelle et sociale. Pas auprès du grand public, car “les survivalistes” ont encore mauvaise presse. Mais au sein de leur communauté.
Quand on pense à la survie, on a plus de possibilité d’exprimer des talents qui ne comptent guère (et donc ne comptaient pas pour les autres) dans le “monde moderne” actuel. Des compétences qui, de plus, ne s’acquièrent pas à l’école, dans le système universitaire ou professionnel classique.
Et on peut enfin trouver des “autres” qui pensent comme nous, avec qui on ne sent pas “étrange”, hors-normes, mal-pensant.e.
Des personnes qui aspirent au même style de vie, et qui reconnaîtront nos compétences.
Qui auront envie de passer du temps avec nous, de créer des choses avec nous. On se construit aussi “contre” ceux qui ne savent pas, ne comprennent rien…
Le besoin de sécurité
En se préparant à la ou les catastrophe.e, individuelle ou mondiale, on se rassure. On se dit qu’on sera prêt.e. Qu’on ne crèvera pas comme les autres, ceux et celles qui seront surpris.ses par l’arrivée du cataclysme, qui n’auront rien préparé, ne sauront pas faire face, ne sauront pas se défendre.
Nous avons, en fait, tous.tes un.e survivaliste en nous.
C’est dans la nature humaine que de prévoir les dangers. C’est notamment, d’après les anthropologues, la peur et l’anticipation du futur, qui nous a permis de développer notre cortex préfrontal. Et de survivre, de nous reproduire. Et de devenir l’espère humaine telle que nous la connaissons.
C’est par exemple en anticipant les dangers qu’on se construit un toit, pour se protéger des orages, même quand le temps présent est au beau fixe. C’est en anticipant la disette qu’on fait des stocks de nourriture, les combats qu’on achète ou fabrique une arme.
Mais certains ont, de par leurs expériences de vie ou leur vision du monde, plus conscience de cet aspect de notre personnalité. D’autres préfèrent la nier, ou s’en moquer, ou la cacher.
Homo sapiens sapiens
Même “englués” dans notre vie moderne, citadine et connectée, nous savons quand un danger semble imminent. Preuve en est de la réaction immédiate à l’annonce d’une pandémie mondiale de COVID-19 : la constitution de réserves de nourriture et de biens de première nécessité.
Bien que raillée par beaucoup, ce comportement “de survie” est pourtant la preuve que nous réfléchissons et réagissons vite. Pas forcément bien… mais nous ne restons pas passifs quand un danger menace. Et beaucoup d’entre nous ont, de manière plus ou moins consciente, concrète, la perception actuelle d’un danger.
Soit parce qu’on souffre déjà d’une instabilité économique, d’une précarité, qu’on a connu des moments de disette, des accidents de vie. Mais aussi parce que les médias évoquent de plus en plus les possibilités d’effondrement de notre “système” moderne, qui fonctionne en flux tendu.
Rien ne dit qu’on survivra à l’effondrement, ou plus simplement une catastrophe. Un tremblement de terre, un licenciement ou une maladie. Mais il est vrai que plutôt que de nier sa peur, il est plus courageux d’y faire face. Et de faire en sorte d’essayer de s’y préparer. Un peu, beaucoup, passionnément pour certain.e.s.
Cela a déjà le mérite de permettre, dans le présent, de vivre un peu mieux avec ce qui est, ce qui sera.
Mais si on veut vivre encore mieux, après la survie personnelle, il est également encore plus intéressant, et plus épanouissant, d’agir dans le monde présent.
Pour essayer de sauver ce qui peut l’être. Et on ne parle pas du capitalisme ! Mais c’est une autre réflexion…
Vision matérielle ou spirituelle
Pour certain.e.s, la préparation à l’effondrement (local ou mondial, rapide ou lent) est avant tout matérielle. On parle de techniques et de technologies, d’acquisition de denrées, d’outils et d’armes.
Pour d’autres, c’est avant tout une réflexion spirituelle. C’est se replonger dans l’histoire de l’humanité, dans nos modes de vie passés (anthropologie). C’est revoir notre rapport aux ressources, au temps, notre relation à la nature et à nous-mêmes, aux autres aussi (philosophie).
C’est pour d’autres se rappeler que nous allons mourir… Et l’accepter, dans un monde qui refuse d’y penser, de le voir, de vivre les pertes, les deuils (développement personnel).
C’est se rendre compte que la nature est remplie de dangers, de surprises, d’insécurités. De notre incapacité à dominer des événements météorologiques par exemple, dans un monde moderne où on cherche à tout dominer, tout contrôler. C’est réapprendre l’humilité. Et le rapport à la nature, aux biens matériels, ou au temps. A ce qu’on fait de notre temps justement, au sens de notre vie, à notre rôle dans le monde.
La question de la sobriété et du sens sont fondamentales chez les décroissants, là où l’utilitarisme prévaut chez les survivalistes.
Jean-Marc Gancille, cofondateur de Darwin
Seul.e enfin… ou enfin ensembles !
“Liberté en solo ou vie en communauté”
On retrouve ce grand écart chez les survivalistes : il y a ceux et celles qui espèrent enfin pouvoir s’échapper de ce “groupe” (famille, village, société, monde) qui leur pèse. Et ils y a ceux et celles qui, au contraire, recherche la vie au sein d’une communauté soudée.
Pour certain.e.s, se recentrer sur l’autonomie individuelle, c’est aussi (re)prendre la liberté de vivre comme on veut, où on veut, et avec qui on veut. C’est à dire parfois seul.e, libre de son emploi du temps, de faire ses propres choix sans contraintes.
Ces personnalités ne sont pas forcément asociales, elles cherchent surtout à s’émanciper d’une société “de moutons”, aliénante pour certains. C’est pouvoir goûter au calme d’une vie construite au bout d’un champ, au fond d’un bois, dans un van ou un camping-car.
Pour d’autres au contraire, la résilience ne se joue qu’avec les autres.
Dans un monde de plus en plus individualiste, où l’on vit de plus en plus seul.e.s, et célibataires, l’envie de retrouver une cohésion de groupe, de vivre en communauté, se retrouve chez les néosurvivalistes, notamment ceux qui se définissent écologistes.
Eco-lieux et éco-hameaux, associations, groupes d’entraide sur les réseaux sociaux… Les initiatives fleurissent pour se rassembler entre personnes qui se ressemblent. Qui ont eu les mêmes prises de consciences et aspirent à la même vie.
En plus, bien sûr, de créer un groupe qui permettra une plus grande résilience. Car pour les sociologues et les anthropologues, le groupe humain est à la base de la survie.
Le survivalisme, un loisir pour tous.tes ! 😉
Tout le monde y trouve son compte, entre le côté fantasmé de la fin du monde et l’envie d’un retour à la nature, au partage, à la vie en communauté.
Eleonor Lluna, guide survivaliste, Time on Target, en Côte d’Or (Bourgogne)
C’est une boutade – sans en être une.
Dans une société plus adulte et plus réfléchie, passer son temps à se former aux techniques de soins ou de construction d’abris semble plus intelligent que de faire du binge watching sur Netflix.
Sauf peut-être, si ce sont des documentaires sur la survie !
Mais c’est aussi un bon moyen de trouver des activités qui ont du sens. Qui permettent de grandir, de se construire.
La fin du monde moderne, de la société thermo-industrielle n’arrivera peut-être pas.
Mais chacun.e d’entre nous peut vivre individuellement des épreuves qui remettront en question sa santé, ou ses finances, voire… sa vie.
Se préparer à affronter des bouleversements, quels qu’ils soient, représente donc une activité qui apportera estime de soi et confiance en le futur. Que du bonus, en somme.
Et si en plus ça peut être fun…
Sources :
Notre présent est si sûr que notre avenir nous angoisse – Libération
Fin du monde : les survivalistes à bunker ouvert – Libération
Le survivalisme en France : la réponse à une société en perte de valeurs – Résilience Urbaine
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